Le Parti socialiste demande le retrait du projet de loi
sur "l’immigration choisie"
A la veille de la reprise des travaux parlementaires, les manifestations du 1er mai ont mêlé, dans une même dénonciation, les politiques gouvernementales en matière d’emploi, ainsi que celle dite d’"immigration choisie" au coeur du projet de loi de Nicolas Sarkozy, dont la discussion commence mardi 2 mai à l’Assemblée nationale. Pour ce texte, le gouvernement devrait demander l’urgence.
Samedi 29 avril, des milliers de personnes avaient manifesté à Paris à l’appel d’un collectif regroupant partis, syndicats et associations. "J’aime la France, donnez-moi une chance d’y vivre !" pouvait-on lire sur les banderoles : une réponse aux propos tenus une semaine plus tôt par le ministre de l’intérieur ("Si certains n’aiment pas la France, qu’ils ne se gênent pas pour la quitter"), en écho déjà à un mot d’ordre de l’extrême droite ("la France, aimez-la ou quittez-la").
Le matin même, aux Etats généraux des populations noires, qui se tenaient à la Mutualité à Paris, ces propos de M. Sarkozy avaient suscité un échange houleux entre l’assistance et Patrick Devedjian, invité par le Conseil représentatif des populations noires (CRAN). Sous les huées de la salle, le conseiller politique du président de l’UMP, avait tenté d’expliquer que ces propos ne constituaient pas "une injonction", mais "simplement quelque chose de raisonnable (...) qui s’adresse à tout le monde". M. Devedjian n’avait pas davantage convaincu la salle lorsqu’il avait défendu l’idée d’"immigration choisie". "Quand on me parle d’immigration choisie, je vois bien qui l’on veut choisir et qui l’on ne choisira pas !" avait déclaré, en ouvrant la journée, le président du CRAN, Patrick Lozès.
Le débat qui s’engage s’annonce essentiellement politique. Sur les droits des immigrés comme sur le CPE, la gauche espère pouvoir continuer à mettre le gouvernement sur le reculoir.
"UNE LOI HONTEUSE"
Le Parti socialiste n’a pas l’intention de mener une bataille d’amendements. Il entend réclamer le retrait d’un texte qu’il juge, selon Bernard Roman, principal orateur du groupe, "dangereux, inutile et inefficace". Dangereux, estime le député du Nord, "parce qu’il porte atteinte aux valeurs de la France et organise un recul des droits liés à la vie familiale et à l’asile". Inutile, "parce que les aménagements en matière d’immigration de travail auraient pu être effectués par la voie réglementaire". Inefficace, enfin, "parce qu’il provoquera mécaniquement une augmentation de l’immigration clandestine en France". La secrétaire nationale du PCF, Marie-George Buffet, a pour sa part dénoncé "une loi honteuse".
La volonté de privilégier l’"immigration choisie" a également suscité les réactions des églises, qui se sont émues des "conséquences sur le sort qui sera réservé à tant d’hommes et de femmes à la situation fragile".
Les recevant samedi 29 avril à Matignon, le premier ministre, Dominique de Villepin, a assuré au président des évêques de France, le cardinal Jean-Pierre Ricard, et au président de la fédération protestante, Jean-Arnold de Clermont, que le projet de loi pourrait être amendé pour répondre à certaines de leurs demandes. Ainsi la commission des lois a-t-elle donné son feu vert à un amendement évitant que la carte de séjour puisse être retirée lorsque le contrat de travail a été rompu.
En dépit de quelques aménagements, le projet de loi donne un nouveau tour de vis aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France. La commission des lois a d’ailleurs accepté plusieurs amendements visant à renforcer le contrôle sur l’obtention du contrat d’intégration, afin que "ce contrat devienne une ardente obligation et non une sympathique formalité", selon le rapporteur du projet de loi, Thierry Mariani.
Pour le député (UMP) du Vaucluse, le "message" du projet de loi est clair : "Le contrat d’intégration doit devenir une étape indispensable pour le droit de résider en France."
Patrick Roger et Laetitia Van Eeckhout