La Blessure
De Nicolas Klotz
Scénario: Elisabeth Perceval
(France, 2004, 2h40)
Avec Noëlla Mobassa, Adama Doumbia, Matty Djambo, Ousman Diallo…
Quinzaine des réalisateurs Cannes 2004
D'après le livre, La Blessure d'Elisabeth Perceval qui relate le tournage d'une fiction sur les demandeurs d'asile en France.
Synopsis : Blandine part rejoindre son mari Papi, installé en France. Son arrivée dans l’Hexagone est similaire à celle de centaine de passagers en provenance d’Afrique : elle est maintenue en zone d’attente à Roissy et sa demande d’asile est ignorée de la même façon que l’est sa personne. Elle est même blessée lors d’une intervention musclée de la Police Aux Frontière. Dès lors, malgré ses retrouvailles avec son mari, elle s’enferme dans le silence et ne voit pas autre chose de ce pays d’accueil que le squat aux fenêtres murées où Papi réside…
Critique : Nicolas Klotz et sa scénariste Ellisabeth Perceval poursuivent le remarquable travail qu’ils ont entamé avec « Paria » en filmant à nouveau un monde que l’on ne voit pas, ou que l’on ne veut pas voir, à l’intérieur de la société française. Sur la question de la pauvreté ou de la mise à l’écart, Perceval et Klotz restent fidèles au parti pris de « Paria », où la dureté ne signifie jamais un rapport complaisant à la dégradation. Derrière l’envie de filmer les conditions d’accueil des demandeurs d’asile et leur isolement dans la marginalité, on sent rapidement des mois d’intimité et de témoignages recueillis avec des personnes ayant inspiré le parcours de Blandine ou de Papi et qui, peu à peu, déterminent le dispositif du tournage. Un temps passé ensemble qui permet de creuser le chemin de la fiction vers un récit d’apprentissage et un hypothétique retour à la vie, vu à travers le personnage de Blandine.
L’idée maîtresse de Nicolas Klotz est de travailler et surtout de casser la distance du spectateur par rapport à ce qu’il voit : la tordre, la dilater, pour l’emmener très près, pour que cela soit à vif (la première partie, située sur le Tarmac de Roissy), trop près aussi pour qu’il ait envie de reculer, puis l’éloigner un peu pour qu’il soit en mesure d’apprécier ce qu’il voit, ou d’y réfléchir (formidables instants de retrouvailles de Blandine et Papi, sur une bande de gazon, entre deux échangeurs autoroutiers).
Klotz « emmène » effectivement le spectateur, et le conduit à se demander ce qui est peut être appréhendé par lui et ce qui ne peut pas l’être, puis à devenir attentif à ce qui touche ou provoque le rejet, pour lui donner conséquemment la capacité d’y réfléchir. Le genre du récit d’apprentissage lui donne ainsi l’occasion d’aller dans une zone de la société où il n’ira pas. La marginalité, comme en témoigne une dernière partie portée par le monologue d’un travailleur clandestin, devient l’occasion d’une déclaration forte et clairvoyante, au lieu d’une affliction, en rappelant que la plupart des habitants de la planète vivent dans les conditions des personnages de « La Blessure » et que le spectateur occidental reste un marginal par rapport à eux. « La Blessure » est au final devenue un film, non sur la marginalité, mais sur la majorité.
Julien Welter
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La Blessure
de Nicolas Klotz
Scénario: Elisabeth Perceval
(France, 2004, 2h40)
Avec Noëlla Mobassa, Adama Doumbia, Matty Djambo, Ousman Diallo…
Sortie du 6 avril 2005